Art de vivre italien

L’Italie des grands chefs, Vito Mollica en Basilicate

Vito Mollica est un ami d’Ali di Firenze depuis les premiers moments et c’est surtout le chef du restaurant étoilé du Four Seasons de Florence, Il Palagio. Comment occupe-t-on une place aussi prestigieuse? La formation sans doute, les établissements où il a fait ses armes aussi, mais probablement également des choses remontant à son enfance. Vito est originaire de la province de Potenza, en Basilicate, une petite région de l’extrême sud italien, coincée entre les Pouilles et la Calabre. Ses premiers souvenirs culinaires, ils sont là, même si à l’âge de 6 ans, sa famille déménage dans le Nord de l’Italie, en Lombardie. Sa mère, d’origine lucane, n’a cessé de lui faire découvrir la gastronomie de sa région. Découvrez la Basilicate en sa compagnie !

LA FAMIGLIA A TAVOLA, La famille à table !

Bonjour Vito, quel est ton premier souvenir culinaire ?

Le parfum du pain, de la focaccia, de la pizza qui cuisent dans le four. Je viens d’une famille paysanne, une petite communauté de montagne, nous vivions dans un village de 30 habitants (dont 26 portaient mon nom de famille !) et tous les samedis, nous cuisions le pain pour la semaine dans un four communautaire. Une trompette retentissait lorsque les pains étaient prêts !

 

Qui cuisinait à la maison quand tu étais petit ?

Ma mère ! Mais je dois avouer que mon père se mettait derrière les fourneaux pour quelques déjeuners “rituels”, certains plats spécifiques comme la morue, plat typique que nous mangions le 24 décembre -assaisonnée d’ail, d’huile d’olive, de poivre et d’anchois- ou encore la cuisson des pepperoni cruschi, des petits poivrons locaux qui se mangent grillés.

 

Tes parents t’ont-ils appris à cuisiner ?

J’ai appris à cuisiner en regardant mon père et en aidant ma mère. Je suis le plus jeune d’une fratrie de 4 garçons, avec une différence d’âge très importante entre l’aîné et moi (12 ans). J’étais le plus choyé mais je devais aussi aider ma mère à la maison pendant que mes frères et mon père étaient au travail. En cuisine, je la secondais avec toutes sortes de petits travaux comme le nettoyage des haricots et des légumineuses. J’étais fasciné par ses compétences manuelles folles : elle faisait les pâtes fraîches aves les doigts (orecchiette, cautarogni, strascinati) comme personne, jamais je n’atteindrais sa perfection même si je l’ai beaucoup regardé faire !

 

Un plat que tu mangeais toujours en été ?

Un plat paysan, la ciambotta, une sorte de panzanella avec du pain sec trempé dans l’eau, l’huile, le vinaigre et agrémenté notamment d’oignons et de tomates.

 

Et un plat qui te rappelle tes hivers en Basilicate ?

En hiver, une autre version d’un plat paysan, une acquasala, à nouveau avec des restes de pain, une louche de bouillon de poule, un oeuf frit cuit dans l’huile d’olive extra vierge, bien poivré et saupoudré de fromage pecorino. Un régal.

Un plat que vous mangiez en famille à certaines occasions, autour d’une grande table ?

À Noël ou à Pâques, nous mangions toujours une spécialité de ma mère, le timballo di pasta, une sorte de lasagne de notre région. Chez nous, les feuilles de pâtes sont réalisées uniquement avec du blé dur et de l’eau, ça donne quelque chose de beaucoup plus léger que la pâte aux œufs confectionnée dans le Nord. Pour la sauce, ma mère faisait cuire de très petites boulettes de viande (un mix de porc et boeuf), il y avait de la scamorza (un fromage) en dés, des restes de charcuterie. Une fois qu’elle montait la lasagne, elle alternait la pâte et la sauce avec un oeuf battu et du pecorino râpé en abondance. Une fois que le timballo cuisait dans le four, ma mère n’acceptait aucun retard à table ! 

 

Que cuisinerais-tu à des amis pour leur faire découvrir ta gastronomie locale ?

Je commencerai par une dégustation de pepperoni cruschi, qui me paraissent être le meilleur des accueils, puis des pâtes aux pois chiches, des ravioli farcis à la ricotta et aromatisés à la menthe, un délice. Ensuite, je cuisinerai de l’agneau (viande qu’on mange traditionnellement aux fêtes) cuit au four avec des patate arraganete (des pommes-de-terre avec beaucoup d’origan).

 

Quand tu retournes en Basilicate, quelle est la première chose que tu fais ?

Avant toute chose, nous nous arrêtons dans un restaurant très simple, “La Taverna”, à Lagopesole (province de Potenza). Nous y mangeons des produits typiques comme des pois chiches, des pepperoni cruschi et du pecorino! Après seulement, nous allons ouvrir la maison puis saluer la famille !

 

Comment ta région et sa gastronomie t’inspirent dans ta cuisine ?

Ma cuisine est celle du parcours de quelqu’un qui a beaucoup voyagé, vécu dans différents endroits. Aujourd’hui,  je me sens chanceux d’être fils d’immigrant (quand j’étais petit ce n’était pas le cas, c’était difficile). Outre ma formation et les techniques d’apprentissage, mes souvenirs d’enfance sont toujours présents dans ma cuisine, j’ai pu observer beaucoup ma famille. J’ai continué à vivre la Basilicate à la maison, même après notre déménagement. Et à 14 ans, quand j’ai débuté dans l’hôtellerie, j’ai commencé à apprécier la cuisine lombarde, du Nord. Mes goûts du Sud (une cuisine rustique, domestique) se sont accordés à mes goûts du Nord (une cuisine également rustique et domestique mais aussi plus fine, plus travaillée).

TOCADE DE CHEF, Le pain de la Basilicate

Si tu étais un ingrédient ou un produit de Basilicate, lequel serais-tu ?

Avec un nom de famille comme le mien, je suis obligé de répondre le pain (Mollica signifie en effet “mie”) !

 

  • Origine et histoire / Dans la communauté paysanne d’où je viens, le pain est considéré comme un ingrédient principal, comme le riz pour les chinois ou la polenta pour les vénitiens. Dès la fin de la seconde guerre mondiale, chaque famille de Basilicate semait, récoltait et apportait sa récolte au moulin. Il y avait un vrai soin apporté car le pain constituait la base de nos repas, la matière première se devait donc d’être excellente et très nutritive. 
  • Ingrédients / Chaque famille avait son secret au niveau des quantités, mais je peux vous dire que chez nous, les ingrédients étaient les suivants : de la levure mère faite maison, de l’eau de source, de la farine de grains antiques (Saragolla, Senatore Cappelli pour ma famille) et un peu de sel. Je n’en dirai pas plus !
  • Anecdote / Vu que chacun réalisait son pain avec sa propre récolte et sa recette familiale, le pain de chaque famille était unique. Puisqu’on cuisait dans un four communautaire, toutes les familles avaient un sceau avec leur insigne pour frapper le pain, afin de le reconnaître après cuisson !

MY BASILICATA BOWL, Le déjeuner parfait signé Vito Mollica

Pour terminer, chez Ali di Firenze, a pranzo (pour le déjeuner), on adore se préparer un « My italian bowl », à la fois super sain et gourmand: une base avec beaucoup de légumes, une céréale, éventuellement des protéines… Quel serait, selon toi, le parfait « My Basilicata bowl » ?

Super idée ! Alors, je dirais, pour la base, des pois chiches cuits à l’eau et une belle salade avec des herbes sauvages (agretti, -soude commune- et du radicchio des champs par exemple). On assaisonne avec de l’huile et du vinaigre, on ajoute évidemment des croûtons de pain grillé avec un peu de pecorino râpé dessus (pour du croquant gourmand), de la saucisse lucanienne, de la scamorza fraîche en dés. Et en clou du spectacle, un œuf poché saupoudré de poudre de pepperoni cruschi. Cela nous donne un bowl avec de belles couleurs dramatiques : le vert des herbes, le rouge des pepperoni cruschi, le jaune de l’oeuf !

 

Grazie mille Vito !

 

A presto pour une nouvelle interview « L’Italie des grands chefs »,

Emilie

 

Retrouvez les recettes et interviews de Vito Mollica ICI

Le restaurant étoilé où Vito officie, Il Palagio 

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Les bonnes adresses de Vito en Basilicate

Des boutiques/épiceries

L’Antico Forno di Valvano, pour le pain

Forno ai giardini 4, Avigliano 

Timpa del cinghiale, pour les charcuteries

Via Germania, Piano S.Nicola di Pietragalla 85016 Pietragalla 

Vincenzo Marottoli, pour la salsiccia a catena di Cancellara, une saucisse typique de la région

Contrada San Procopio, 85013 Genzano di Lucania 

Azienda agricola e caseificio Pessolani, pour le provolone

Via G. Marinelli, 96 Abriola 85100

Caseificio Caggiano Forenza, pour le pecorino

Contrada Piro Sorba, 4, 85023 Forenza 

Des restaurants

Ristorante Pietra Del Sale di Leonardo e Vincenzo

SP50, 85020 Avigliano

Ristorante C’era una volta

Via Valle Paradiso, n. 94, 85100 Potenza

Trattoria La Locandiera

Corso Umberto I, 194, 75012 Bernalda 

La Taverna di Lagopesole

Corso Federico II di Svezia 7, 85021 Lagopesole 

Par Emilie Nahon

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