Interview

Les habitudes d’Elsa Valensi à Palerme

J’ai rencontré Elsa Valensi via instagram. Les réseaux sociaux, souvent chronophages et un brin angoissants (#Influenceuseparfaite), ont la vertu d’ouvrir des portes, de créer des liens avec des gens qui se retrouvent d’une manière ou d’une autre, dans ce que je poste. Elsa vit en Sicile, a travaillé à Paris et y a des amis, un réseau. C’est un contact commun (Merci Sophie Trem !) qui l’a poussée à découvrir mes épisodes Dolce Follia. Depuis on ne se quitte – virtuellement- plus !

J’avais très envie d’interviewer Elsa. Tout d’abord pour ses multi-casquettes professionnelles qui en font une personne passionnante. Scénariste pour la télévision, le théâtre, le cinéma, elle a créé en parallèle une ligne de bijoux Bohemian Rhapsodie Paris (vendue chez MERCI, BIRDY, ORADENA) produite entièrement par des artisans siciliens. Puis j’aime le lien qui unie Elsa à l’Italie. Depuis toujours, elle a un pied dans le pays et savait que d’une manière ou d’une autre, elle finirait par y déposer sa valise. La voilà qui nous raconte son histoire, solaire et énergique, en direct de Palerme.

 

Bonjour Elsa ! Ton parcours pro est fascinant. Peux-tu le résumer brièvement ?

Je suis scénariste et auteure, j’écris essentiellement de la comédie. J’ai fait de la télévision comme chroniqueuse après mes études de journalisme et de théâtre. C’est sur un plateau que j’ai rencontré celle qui allait devenir ma complice pour l’écriture, Elisabeth Bost. Ensemble on a beaucoup écrit notamment pour le théâtre.

Tu as joué également ?

Oui ! Avec Elisabeth nous avons écrit « Jour de Neige » à 4 mains, qui a été joué au Palais des Glaces et mis en scène par Philippe Lellouche. Pendant 6 mois j’ai interprété un des 4 personnages féminins. Une expérience incroyable sur scène, et un rythme de vie frénétique.

Comment fonctionne l’écriture avec Elisabeth, le duo ?  

Elisabeth et moi c’est un coup de foudre amical et professionnel. Si je commence un paragraphe elle peut le terminer et personne ne verra la différence de style. Pour la pièce, l’idée à germer lors d’un week-end à Rome où nous étions toutes les deux.

Comment s’est greffée l’activité de créatrice de bijoux ?

Par hasard. J’ai toujours adoré les bijoux et un été en faisant du bateau, je me suis dit que j’aurais aimé avoir des bijoux qui résistent à l’eau de mer. Pendant ce même séjour, j’ai trouvé sur un petit stand de bijoux comme on en trouve souvent sur les marchés de vacances, une jeune femme qui mélangeait des pierres, des grelots, et du fil huilé. J’ai trouvé ça intéressant et original, mais c’était beaucoup trop baba cool pour être un produit qui correspond aux Françaises. Il fallait réfléchir à comment le réinventer.

« Je cherchais simplement des bijoux qui résistent à l’eau de mer »

Comment t’es-tu lancée concrètement ?

J’ai dessiné un premier modèle et demandé à la jeune fille de m’en produire quelques-uns. J’ai tout de suite adopté un style un peu roots que je qualifierais de bohème chic, en mélangeant les grelots, du macramé à des matériaux plus précieux. L’idée c’était d’atténuer le côté trop babacool et de moderniser le produit. Puis j’ai profité d’un voyage en Thaïlande pour me fournir en bronze de joaillier (qui ne décolore pas et reste toujours aussi brillant) et en pierres, toujours avec cette contrainte de matériel qui ne bouge pas avec l’eau.

As-tu continué à travailler avec cet artisan de rue ?

C’était assez compliqué et j’ai mis du temps à trouver un système de production artisanal qui me convienne vraiment. Maintenant je travaille avec 6 siciliennes adorables d’une soixantaine d’années qui font les bijoux par passion ! Elles sont pilotées par la truculente Brigida. On se voit une fois par semaine pour faire le point sur les commandes. Sur la table il y a le café, les gâteaux… C’est très convivial et j’aime ce rapport bienveillant avec les gens.

« Un style bohème chic produit par 6 siciliennes passionnées ! « 

Raconte-moi justement ton rapport avec l’Italie.

L’Italie a toujours fait partie de ma vie. Ma grand-mère était de Livourne et j’ai passé toute mon enfance sur les plages de Viareggio. Puis on partait avec mes parents découvrir des villes plus au nord et faire le plein côté culture. J’ai aussi pris l’habitude autour de mes 20 ans d’aller très souvent à Rome et d’y passer un ou deux mois. Vivre en Italie, me marier avec un Italien a toujours été sur ma feuille de route !

Et l’arrivée en Sicile ?

J’ai fait un premier voyage à 18 ans avec des amis à Cefalù … puis il y a eu mon déménagement en 2009, à 33 ans pour rejoindre mon amoureux que je connaissais depuis quelques mois.

Le choc !

Je vivais à Paris et je n’en pouvais plus. J’étais angoissée, je détestais sortir, je devenais mélancolique…  J’avais besoin d’un changement radical. L’arrivée à Palerme a été très spéciale. Un changement d’univers complet. Ce qui m’a beaucoup aidée, c’est que finalement je pouvais continuer mon travail à distance.

Tu ne connaissais personne ?

Non ! Et mon chéri, romain, non plus. Il a déménagé en Sicile car il montait son projet et avait besoin d’être au plus proche de l’usine. On était donc dans notre bulle, en osmose. C’était assez irréelle comme situation car avant d’avoir des enfants nous vivions dans une grande maison qui était une ancienne écurie. Une sorte d’hacienda avec des palmiers, un patio, la vue sur la mer. C’était très calme et bucolique. Autant te dire que ça changeait de Paris !

« À mon arrivée en Sicile, nous vivions dans une hacienda

avec des palmiers, un patio, la vue sur la mer. Dingue après Paris »

9 ans que tu vis en Italie. Est-ce que la douceur de vivre te touche toujours autant ?

La vie est douce, sans aucun doute et les années ont fait que je me suis réglée sur le rythme local. Le matin, on va piano piano … en dix minutes on est à la mer, en une heure on est au ski. Mais mon plus grand plaisir, c’est de faire du bateau, pour moi la liberté absolue.

Tu as bien circulé en Sicile. As-tu des lieux que tu affectionnes particulièrement ?

Avec un bateau tu vas partout, c’est merveilleux et tu profites de toutes les petites îles autour de la Sicile. Bien sûr il y a les îles éoliennes, ma préférée est Salina. Mais aussi les îles Égades de l’autre côté comme Favignana. Au cœur des terres de la Sicile, il y a Cefalu où tu peux louer une maison, les villages baroques somptueux, Syracuse et sa presqu’île Ortigia, le Gole dell’Alcantara, les villages qui bordent la mer au sud comme Vendicari, San Lorenzo,…

« Faire du bateau, pour moi la liberté absolue »

À Palerme, est ce qu’il y a des adresses que tu nous conseilles pour manger ?

Je trouve qu’il est difficile de trouver d’excellentes adresses à Palerme car souvent la cuisine est un peu grossière. Il y a quand même quelques restaurants qui tirent leur épingle du jeu : Trizzano, un petit restaurant en terrasse situé juste au-dessus d’un port. Il y a de l’ambiance et c’est très chouette aussi pour l’apero. J’aime beaucoup aussi le streetfood que l’on peut trouver piazza della Kalsa juste au niveau du Foro Italico, le lieu s’appelle Chiluzzo. Des croquettes de pomme de terre, des carrés de farine de pois chiche frits …il y a toujours la queue, c’est super propre, j’en suis folle ! Puis aussi Vino Veritas, vraiment délicieux et Pizzo&Pizzo, parfait si tu cherches de la vraie cuisine traditionelle sicilienne. Pour changer d’ambiance il y a Bisso dans le centre historique, qui me fait penser à un bistrot Parisien, impossible d’avoir une table sans résa. Mais le must pour moi c’est Gagini, un restaurant vraiment cher mais à tomber de beauté et de bonnes choses en plein centre historique.

Si on veut manger quelque chose de simple ? Une pizza ? 

Une trattoria plus « casareccia » comme on dit ici, à la bonne franquette, c’est Il Biondo. Sinon il y a plein de petits restos chouettes dans le marché typique de Palerme, la Vucceria. Quant à la meilleure pizza elle est chez Frida.

Pour l’apéro ?

À Palerme, tout se passe sur le trottoir du bar, les gens sont devant, avec leur clope et leur verre de vin ! En été, j’adore aller sur la terrasse du port de l’Arenella, c’est très très joli. Derrière chez moi il y a Da Mazzini 30, un bar moderne qui fait des cocktails à tomber ! Les propriétaires sont sexys, ce qui n’enlève rien au charme des lieux. Excellents cocktails et tapas du monde entier revisités chez Bocum. C’est par contre un peu plus cher.

Le meilleur poisson grillé ?

Tu le manges chez Salvo juste à côté de la piazza Kalsa. Je prends religieusement la salade typique qui s’appelle la Vastasa, cela signifie « mal élevée » !

Une bonne glace ?

La meilleure glace est au Kiosko devant la mer à Mondello, à 20 minutes du centre de Palerme. Aucun rapport, mais on trouve aussi de délicieuses pasta alle vongole (palourdes) à la trattoria Simpaty, toujours à Mondello.

Ton plat sicilien préféré ?

C’est un antipasto traditionnel, la Caponata. Mangée avec 6 kg de pain, je peux mourir en paix !  Aubergines, tomates dans leur sauce, olives, câpres … Sinon le crocche, qui sont ces fameuses croquettes de pomme de terre, et les pasta alle vongole, particulièrement réussie ici.

« Aubergines, tomates, olives, câpres … je suis une folle de caponata »

Des lieux que tu adores dans ta ville ?

J’adore la galerie d’art moderne, les palais à tomber comme palazzo abatellis, palazzo branciforte … Je me rends très souvent au jardin botanique avec ses arbres millénaires. Je vais aussi flâner au marché aux puces de la Piazza Marina le dimanche matin. Après, je file déjeuner chez A`cala sur le port de Palerme.

Une plage dans le coin où tu vas souvent ?

À Mondello, la plage de Palerme qui est un peu les Caraïbes hors saison ! Autant de dire qu’on y est très souvent. La plage de cefalu à quelques kilomètres de Palerme c’est pareil, elle est sublime et hors saison c’est vraiment le paradis. On y déjeune d’un pique-nique sur la plage et les enfants s’y amusent toute la journée, même durant les belles journées d’hiver.

Est-ce que le week-end tu as des habitudes particulières ?

Nous avons vécu à la campagne au bord de la mer pendant 4 ans et demi, nous ne restons pas en ville le week-end. On fuit littéralement Palerme ! On aime partir dans des agriturismo, des sortes de B&B dans la campagne où l’on déjeune et se balade.

À Palerme, comment sortir des sentiers touristiques ?  

En hiver quand tout le monde est agglutiné sur la via piétonne, j’adore faire quelques km et déjeuner dans un restaurant super chaleureux qui est à Trabia et qui s’appelle Il Bragone. La cuisine est à tomber, il y a peu de monde, seulement les initiés, un feu de cheminée et des jeux en extérieur pour les enfants. Les propriétaires sont adorables et surtout passionnés par ce qu’ils font, par leur cuisine. De manière générale, j’’adore les gens passionnés dans tous les domaines qui savent vous transmettre littéralement leur enthousiasme. Vous ne pouvez alors qu’aimer ce qui les passionnent !

Comment visiter la ville ? Une idée originale ?  

Mieux que les calèches de touristes j’adore les petites APE, des voitures minuscules typiquement italiennes qui font le tour de la ville ! Il m’arrive encore après 9 ans à Palerme d’en prendre une avec les enfants pour le plaisir. Le bus de touristes c’est à faire une fois avec les enfants, c’est drôle ! Sinon je conseille aussi d’aller dans les iles avec les aliscafo.

Est-ce que tes bijoux ressemblent à ta vie ici en Sicile ?

Il y a ce mix roots et précieux, des tourmalines, du fil huilé et des matières plus surprenantes … C’est finalement assez proche de ma vision de Palerme, des racines anciennes avec un twist un peu fou.

Merci Elsa !

Le carnet d’adresses d’Elsa :

  • Trizzano, Piazza Tonnara, 2 / 091 637 3185
  • Chiluzzo, Piazza della Kalsa, 7
  •  Vino Veritas,Viale Boris Giuliano, 22 / 091 342117 fermé dimanche
  • Pizzo&Pizzo, Via XII Gennaio, 1 /091 601 4544 fermé dimanche
  • Bisso, Via Maqueda, 172A / 328 131 4595 fermé dimanche
  •  Gagini,Via dei Cassari, 35 / 091 589918
  • Trattoria Il Biondo, Via Giosuè Carducci, 15 /091 583662
  •  Marché la Vucceria, Piazza Caracciolo / 8h-14h sauf dimanche
  •  Frida, Piazza Sant’Onofrio, 37/38 / 091 550 5440 le soir uniquement, fermé mardi
  • Mazzini 30 Taverna, 30, Via Giuseppe Mazzini / 091 508 5808 fermé lundi
  •  Bocum Mixology, Via dei Cassari, 6 / 091 332009 fermé lundi
  • Restaurant Salvo, Via Torremuzza 28 /+39 334 335 1329
  •  trattoria Simpaty, Via Piano di Gallo, 18, Mondello / 091 454470
  • galerie d’art moderne, Via Sant’Anna, 21 / fermé le lundi
  • jardin botanique, Via Lincoln, 2 / tous les jours 9-17h
  • À Cala, via cala (port de Palerme) / 091 332524
  • Restaurant Il Bragone, Contrada Bragone, 90018 Termini Imerese / 091 814 7722 fermé mardi

Par Ali

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